lundi 26 novembre 2012

L'ethnopolar s'invite au Cercle de Lecture

Le pionnier de ce genre, Arthur Upfield, a fait de la culture aborigène la toile de fond de ses enquêtes policières, mais d'autres cultures ont également été visitées ce soir.

Culture aborigène
*L’empreinte du diable, de Arthur Upfield
Ed. 10 x 18 – 2008
Dans l'État de Victoria, en Australie, la quiétude d'une petite pension isolée va être troublée par la découverte du corps d'un des clients, un certain Grumman. Ses bagages ont mystérieusement disparu et le premier inspecteur dépêché sur les lieux est assassiné par un gangster bien connu des services de police.
L'armée a justement chargé l'inspecteur Napoléon Bonaparte d'enquêter sur les agissements de ce Grumman, soupçonné d'être un espion allemand.  L’enquête se fait au nez et à la barbe de quasi tous les pensionnaires et employés de la pension et certains d’entre eux sont suspectés par "Bony" dont le flegme est parfois mis à mal. Ses déductions s’affinent au fur et à mesure et on apprend que quelques uns jouent un double jeu…
Un roman dans le style Agatha Christie. L'enquêteur, de culture aborigène, reconstitue l'emploi du temps de chacun grâce à sa capacité à lire dans les empreintes laissées dans l'herbe et dans le sable...  - GA 
 
*Tueur d’aborigènes, de Philip McLaren
Ed. Folio – 2005
Soucieux d'être politiquement correct envers ses minorités, l'État australien crée, contre l'avis de ses propres forces de police, une «brigade aborigène». Elle se compose, pour cette immense nation plus grande que l'Europe, d'un homme et d'une femme. Le premier, Gary, est devenu flic, lui qui fut victime pendant sa jeunesse du racisme des Blancs. La seconde, Lisa, a été littéralement arrachée des bras de sa mère à l'âge de cinq ans pour être placée dans un institut légal dirigé par des sœurs. Ces deux-là s'en sont sortis. Ils sont brillants, jeunes, habitués au combat. La découverte à Sydney, pour leur première enquête, du corps détrempé d'une jeune ado sonne pour eux le début d'une traque effrayante. Ce qu'ils vont découvrir, au fil des meurtres, n'est rien moins que l'histoire récente d'une île millénaire.
Pas mal du tout. Cela conviendrait bien à une série TV - HL

Culture Navajo
*La Rivière des âmes perdues, de James D. Doss
Ed. Albin Michel - 1999
Dans les montagnes Rocheuses du Colorado, une vieille femme indienne est troublée par des visions maléfiques. Très attachée aux croyances taditionnelles de son peuple, Daisy Perika a la certitude que les forces des ténèbres sont à l'oeuvre... Le meurtre d'une jeune scientifique, non loin de là, dans la petite ville de Granite Creck, en est-il la preuve ? Meurtre brutal et déroutant de l'avis de Scott Paris, chef de la police. L'enquête dangereuse qu'il s'apprête à conduire va le mener aux frontières d'un monde qu'il connaît, mais aussi de lui-même. C'est initialement par pure curiosité qu'il consent à rencontrer Daisy, la tante de Charlie Moon, un policier indien de la réserve voisine. Elle insistait tant pour être présentée au matukash venu de l'Est. En fait, dans ses rêves, la vieille femme a déjà rencontré Scott Paris. C'était sur la rivière des âmes perdues...
Les coutumes indiennes ne sont pas vraiment au coeur de l'histoire, l'énigme est intéressante, mais l'un des deux meurtres reste non élucidé et on reste sur sa faim - RRD

*Le vent qui gémit, de Tony Hillerman
Ed. Rivages – 2003
Bernie croyait bien ne plus jamais être considérée comme la recrue la plus inexpérimentée de la police tribale navajo, et pourtant… Lors d’une journée bien remplie, elle commet une erreur de débutante. Partie vérifier l’état d’un camion abandonné, elle découvre un cadavre à l’intérieur et conclue à un décès naturel. Ayant récupéré les semences végétales accrochées au jean du mort, elle les place dans une boîte à tabac ramassée au milieu des herbes. Les infirmiers découvrent des traces de sang qui accréditent la thèse d’un assassinat. Le sergent Jim Chee, supérieur de Bernie va devoir expliquer au FBI pourquoi la boîte à tabac se trouve sur son bureau plutôt que sur les lieux du crime. Dans le camion, la découverte d’archives sur la mine du Veau d’or rappelle à Joe Leaphorn une tentative d’escroquerie vieille de cinq ans. De son côté, Jim Chee mène l’enquête tandis que Bernie, voulant faire oublier sa bévue, recherche la fameuse mine d’or et échappe de justesse aux balles d’un tireur inconnu.
Les rites et coutumes navajos sont des éléments essentiels de l'enquête. L'intrigue est bien ficelée et les personnages attachants. Pour les Navajos, le rapport au temps et à la mort est bien différent du nôtre - VB
D'où l'expression "Indian time", pour souligner cette différence, au Canada  - HL

Culture chinoise
*Le mystérieux tableau ancien, de Jiahong He
Edition de l’Aube – 2011
Hong Jun, avocat pékinois, est surtout célèbre par ses talents de détective, admirablement secondé en cela par sa pétulante et ravissante secrétaire, Song Jia. Aujourd'hui, il est contacté par une femme professeur à l'université de Pékin, dont le mari, éminent chercheur dans une société pharmaceutique de pointe, a brusquement perdu la mémoire. Seul, peut-être, un tableau de famille pourra donner la clé du mystère...
L'enquête est menée dans un contexte de corruption qui n'est pas vraiment spécifique à la Chine. Le roman policier est écrit dans un style convenu et enfantin (la faute à la traduction ?), sans charme particulier - CP

Les nouvelles enquêtes du juge Ti, de Frédéric Lenormand
Ed. Points – 2006 
En l'an 668, surpris par une inondation spectaculaire, le juge Ti se réfugie dans une auberge de province. Le lendemain, un des hôtes est assassiné. D'autres cadavres flottent bientôt sur les eaux d'une crue toujours plus menaçante. Accompagné de son fidèle Hong, Ti suit une piste qui mène à un splendide château aux occupants étranges et inquiétants. 
Je recommande chaudement cette série policière sympathique et facile à lire, idéale pour les vacances. Toute la série se passe dans la Chine médiévale. Frédéric Lenormand est l'auteur de nombreux essais historiques - IV

Culture nippone
*Fantômes et kimonos : Hanshichi mène l'enquête à Edo, de Kidô Okamoto 
Editions Philippe Picquier - 2006
Plein de bienveillance mais aussi de malice, Hanshichi est un détective de l'ancien temps qui sait démêler le vrai du faux, démasquer les secrets des jeunes geishas et les entourloupes des fantômes. Car dans le Japon du XIXe siècle, il arrive qu'une mystérieuse coquette en kimono se transforme en énorme chat noir, que les monstres de foire courent les rues où s'escrime un meurtrier à la lance, à moins que l'ombre maudite de la fille du marchand de saké ne vous accompagne, le soir, avec de sanguinaires appétits de vengeance. Autant d'énigmes que notre Sherlock Holmes nippon réussit à élucider dans l'ancienne ville d'Edo aux pittoresques coutumes, en nous contant au passage maintes anecdotes sur les traditions, les fêtes, les usages et les plaisirs de cette époque où les fantômes n'étaient jamais bien loin.
Les subordonnés de l'inspecteur sont plutôt comiques et ne comprennent pas toujours ce qu'il veut, mais à la fin tout s'emboîte comme par miracle. La conclusion : "les méchants de l'ancien temps étaient peut-être plus intègres que les bons d'aujourd'hui" - VD

*La chambre rouge, de Ranpo Edogawa
Ed. Philippe Piquier – 1998
Petit recueil de cinq nouvelles, dont la première est un exemple de cruauté humaine : un homme revenu mutilé de la guerre, amputé des quatre membres et devenu sourd, se retrouve à la merci de sa femme qui "s'occupe" de lui avant qu'il ne trouve une fin tragique.
La troisième nouvelle - "la Chambre Rouge" - est le récit plutôt drôlatique d'un homme qui raconte comment il a tué cent personnes, mais pas de ses propres mains...
Une impression mitigée pour la 1ère nouvelle, j'ai plus apprécié les suivantes - FL
Une atmosphère façon Edgar Poe ou conte fantastique à la Conan Doyle, qui laisse une part importante à l'imagination. J'ai bien aimé - MM
  
*La librairie Tanabe, de Miyabe Miyuki
Ed. Philippe Piquier - 2001

Monsieur Iwa est libraire à Tokyo. Dans la librairie Tanabe, avec l'aide de son petit-fils, féru de littérature, il vend des livres d'occasion. Mais, par l'intermédiaire de leurs clients, tous deux vont se trouver impliqués dans des histoires de meurtres ou de morts étranges. Une grande perspicacité et une clairvoyance certaine, alliées à une solide culture leur permettront de jouer les détectives amateurs.  Il est vrai qu'ils seront conduits à découvrir les coupables grâce au titre d'un livre, ou au détour d'une phrase, clé de toutes les énigmes.
Cinq nouvelles dont le trait d'union est le libraire. Des enigmes plus que des enquêtes policières, tout  est en sourdine et en demi-teinte, suggéré plutôt que dit. Il faut oublier les codes que nous connaissons. Plus de curiosité que de stress, presque apaisant - NM
J'ai trouvé l'histoire plate et le style peu entraînant (problème de traduction ?) - MM

Nous avons poursuivi notre voyage avec des polars qui ne rentrent pas dans le thème ethnologique, mais certains d'entre nous avaient envie de les partager et nous n'avons pas boudé notre plaisir...
Suède
*La terre peut bien se fissurer, de Kjell Eriksson
Ed. Actes Sud – 2010


Dans une maison perdue en pleine forêt, Tore, un ancien junkie en rupture avec la société, tente de se réconcilier avec l'existence. Il rêve de retrouver Eva, la mère de son fils, pour reconstruire sa vie de famille. Près d'Uppsala, un couple apparemment sans histoire est sauvagement abattu. Peu de temps après, une jeune infirmière est assassinée en plein centre-ville.
Les mobiles restent mystérieux, mais c'est la même arme qui a été utilisée et les victimes ont été prévenues d'une semblable et nauséabonde manière. La jeune et talentueuse Ann Lindell est chargée de l'enquête. Elle dirige son équipe criminelle avec maestria, mais dans sa vie privée le doute domine : doit-elle se lier durablement et faire des projets avec cet homme qu'elle aime mais qui vit reclus sur son île ? Dans une époque peu soucieuse de l'humain, où les gens se révèlent incapables de vivre ensemble et de s'entraider, la "vraie victime" n'est pas toujours celle que l'on croit...
On peine à rentrer dans la psychologies des personnages, qui est déterminante pour la compréhension du roman. Au final, un livre bien écrit et intéressant - EG

*La Cité des Jarres, de Arnaldur Indridason
Ed. Points – 2006
Islande - Un nouveau cadavre est retrouvé à Reykjavik. L'inspecteur Erlendur est de mauvaise humeur : encore un de ces meurtres typiquement islandais, un "truc bête et méchant", qui fait perdre son temps à la police... Des photos pornographiques retrouvées chez la victime révèlent une affaire vieille de quarante ans, et le conduisent tout droit à la " Cité des Jarres ", une abominable collection de bocaux renfermant des organes...
Un roman à l'opposé du roman japonais qui précède, dominé par une ambiance anxiogène, haletante, effrayante. L'auteur est un maître du roman noir - NM
Irlande
*Delirium tremens : une enquête de Jack Taylor, de Ken Bruen
Ed. Folio policier
Jack Taylor, ancien flic viré pour alcoolisme sévère, se lance dans une enquête qui le conduira bientôt jusqu'aux bas-fonds de Galway... Entre deux crises de delirium tremens, il ressemble à un équilibriste sur le fil du rasoir. Attention, le précipice n'est jamais loin... 
L'enquête est un prétexte à découvrir le héros alcoolique chronique et incurable, ou peut-être pas... Un héros qui sera à suivre, car c'est là le premier livre d'une série. Un récit imbibé et déroutant, mais plaisant - IV

Sicile
*Un été ardent, de Andrea Camilleri
Ed. Pocket – 2010
 D'abord une invasion de cafards, puis de souris, et enfin de rats : la villa que le commissaire Montalbano a trouvée à Vigàta pour des amis de sa fiancée Livia semble vraiment maudite. La série de catastrophes atteint son paroxysme lorsque le petit garçon du couple disparaît... pour être finalement retrouvé sain et sauf dans un sous-sol dont les locataires mêmes ignoraient l'existence. Mais une autre découverte y attend le commissaire : le cadavre d'une jeune fille du village disparue depuis plusieurs années. Dans la chaleur étouffante du mois d'août en Sicile, Montalbano se lance dans une nouvelle enquête dont la progression est perturbée par la soeur jumelle de la défunte, la ravissante Adriana. Un été ardent pour le commissaire préféré des Italiens qui, entre angoisses de l'âge et tourments de la chair, devra, avant tout, garder la tête froide...
Notre lecteur est un fidèle de Camilleri... L'intrigue policière passe au second plan. L'auteur prend à contrepied tous les codes du polar : grand soleil au lieu de la nuit, héros bon vivant, etc. Cela se déguste ! - SW 

Canada
Le jardinier de Monsieur Chaos, de Francis Malka
Ed. Hurtubise Editions HMH – 2007
Un jardinier est embauché par un riche médecin, monsieur Chaos, pour refaire l’aménagement paysager de sa vaste propriété. Un jour, Chaos lui demande de l’aider à remplir un service très particulier que lui a demandé une amie, condamnée à une mort imminente : l’enterrer sous la statue de son mari, sur la place publique la plus fréquentée du village. La tâche est impossible, mais le jardinier en vient à bout grâce à un tour de force scientifique qui permet de remplacer l’odeur de la putréfaction par celle de l’essence d’une fleur. Bientôt, de nombreux citoyens viennent lui demander la même chose : être enterré à un endroit qui leur est cher… en dégageant un parfum de fleur. Pour la police ce sont autant de disparitions inexpliquées. Un détective mène l’enquête et cherche à répondre à une épineuse question : le jardinier est-il un épouvantable assassin ou un biologiste désintéressé qui enterre les gens par compassion en donnant à leur dépouille le parfum de la fleur de leur choix ?
Un conte macabre, plutôt amusant - MPV

  
Maigret : L’ombre chinoise, de Georges Simenon
Ed. Livre de poche
Raymond Couchet a été abattu dans le bureau de son entreprise, située au fond de la cour d'un immeuble de la place des Vosges. Une somme d'argent (l'ensemble de la paie du personnel) a été dérobée de son coffre-fort, retrouvé ouvert après le crime. Quand Maigret commence son enquête, il découvre que Couchet a laissé un testament léguant toute sa fortune à ses "trois femmes": sa première épouse, son épouse actuelle, et la jeune Nine, sa maîtresse. Or, il se fait que la première épouse de Couchet habite toujours l'immeuble de la place des Vosges où Couchet a ses bureaux.
Un livre de la série des Maigret, adapté plusieurs fois pour la télévision en Angleterre, en Italie et en France. Lire un Maigret est toujours un plaisir - MPV

Death comes to Pemberley, de P.D. James
Ed. Knopf Canada – 2011
*La mort s’invite à Pemberley,
 Ed. Fayard - 2012  
Rien ne semble devoir troubler l’existence ordonnée et protégée de Pemberley, le domaine ancestral de la famille Darcy, dans le Derbyshire, ni perturber le bonheur conjugal de la maîtresse des lieux, Elizabeth Darcy. Elle est la mère de deux charmants bambins ; sa sœur préférée, Jane, et son mari, Bingley, habitent à moins de trente kilomètres de là ; son père adulé, Mr Bennet, vient régulièrement en visite, attiré par l’imposante bibliothèque du château. Mais à la veille du bal d’automne, un drame contraint les Darcy à recevoir sous leur toit la jeune sœur d’Elizabeth et son mari, que leurs frasques passées ont rendu indésirables à Pemberley. Avec eux s’invitent la mort, la suspicion et la résurgence de rancunes anciennes.
J'ai adoré ce livre, écrit à la manière de Jane Austen, une suite à "Orgueil et Préjugés". L'auteure n'a plus rien à prouver, mais elle a pris un risque, et c'est un pur régal ! - HL

*Les titres précédés d'une astérisque sont disponibles à la bibliothèque.


vendredi 23 novembre 2012

Toutes les chouettes réfléchissent beaucoup


Bébés chouettes, un raconte-tapis prêté par la Bibliothèque Départementale
Trois bébés chouettes se réveillent une nuit et découvrent que leur maman est partie. Petit à petit, l'angoisse monte et elles réfléchissent beaucoup : maman va peut-être nous ramener des souris à manger, mais si elle ne revenait pas ? 
Voilà une histoire qui n'a séduit que les plus grands, les plus jeunes ayant vite détourné leur attention, ce qui n'est pas leur habitude - un thème à ne pas aborder trop tôt...
Le livre, qui a inspiré notre tapis, tient le record des albums empruntés dans notre bibliothèque :

Bébés chouettes, de Martin Waddell et Patrick Benson
Ed. L'Ecole des Loisirs
La disparition, même momentanée, de papa ou maman, est source d'inquiétude, et il faut apprendre à se passer parfois de ses parents.

Un jeu de doigts, une comptine, et l'attention de notre public était de retour, piquée au vif :
La fourmi m'a piqué la main 
La traditionnelle chasse au livres s'en est suivie. Nous avions sélectionné une vingtaine de livres cartonnés capables de résister à l'enthousiasme des plus petits.
Le rituel avec les parents et nourrices est à présent bien installé : le moment de lecture partagée fait plaisir à voir...

La prochaine séance des Bébés Lecteurs se tiendra le 14 février 2013