samedi 23 février 2013

Des romans negro-africains au Cercle de Lecture

Cette soirée a été l'occasion de jolies découvertes, tandis que par un heureux hasard, trois titres du même auteur ont été présentés.
*Mémoires de Porc-épic, de Alain Mabanckou
Ed. Points – 2007
Un porc-epic reconte son existence à un baobab. C'est assez déroutant à priori, mais cela se révèle passionnant. Ce porc-épic est le double maléfique d'un homme et tue les victimes désignées par celui-ci la nuit. La petite bête, philosophe, malicieuse, armée de ses redoutables piquants, exécute les souhaits macabres de son maître. Le couple meurtrier sillonne l'Afrique jusqu'au jour où Kibandi rencontre bien plus redoutable que lui...
Fable ou conte ? Ce livre est fascinant. Je n'aurais pas pensé que l'on pouvait se passer de ponctuation. Magnifique ! J'ai voulu aller plus loin, et je vous donne rendez-vous ici - dans une librairie / maison d'édition toute entière dédiée à l'Afrique - EG


*Verre cassé, de Alain Mabanckou
Ed. Seuil – 2006

Verre cassé est le surnom d’un pilier de bar, un alcoolique effacé, abîmé par la vie qui passe son temps à observer la triste humanité qui échoue au fin fond d’un bar crasseux congolais. Un jour, la vie de Verre cassé va changer. Le patron du bar lui propose d’écrire les histoires qui lui passent par la tête sur un cahier qu’il lui remet. Alors Verre cassé va se lancer. Usant d’un style très populaire et haut en couleurs, sur le mode d’un conteur ou d’un griot africain, Verre cassé va nous faire plonger dans la vie stupide à mourir des autres piliers du bar, toute une cohorte de paumés…
Les phrases s'enchaînent sans points, une idée en entraînant une autre, mais ça n'est pas gênant ! Un langage bariolé, peuplé d'images parfois drôles et truffé de références littéraires. L'auteur nous emmène dans les tréfonds de l'humanité, sans aucun misérabilisme. Voilà une découverte et une belle surprise ! - HL

Lumières de Pointe-Noire, de Alain Mabanckou
Ed. Seuil - 2013
Après vingt-trois ans d'absence, Alain Mabanckou retourne à Pointe-Noire, ville portuaire du Congo. Entre-temps, sa mère est morte, puis son père adoptif, peu d'années après. Le fils unique ne s'est rendu aux obsèques ni de l'un, ni de l'autre. Entre le surnaturel et l'enchantement, l'auteur nous ouvre sa petite valise fondamentale, celle des années de l'enfance et de l'adolescence dans ses lieux d'origine. Au moment de repartir, il se rend compte qu'il n'est pas allé au cimetière. Sans doute était-ce inutile...
Mélange de souvenirs tendres et douloureux, les portraits se succèdent, les morts et les vivants se côtoient naturellement. Le regard est celui d’un fin observateur qui laisse à penser qu’il a toujours eu envie de partir. On est complètement pris par le récit - SAD

 *Méharées, de Théodore Monod
Ed. Acte Sud – 1998
Méharées reste le plus célèbre des livres de Théodore Monod, spécialiste incontesté du désert, qu'il parcourt depuis plus de soixante-dix ans à dos de chameau ou à pied.
Ce scientifique exemplaire n'a pas son pareil pour évoquer les paysages mauritaniens, pour raconter ses longues méharées dans les dunes, pour décrire la faune, la flore, l'histoire ou la préhistoire de ces régions où, dans les années 1930, il entendit parler d'une mystérieuse et gigantesque météorite qu'il ne cesserait de chercher, durant un demi-siècle, avec une insatiable curiosité.
Un livre lumineux, qui se lit très facilement et avec un très grand plaisir - MM

*Disgrâce, de John Maxwell Coetzee
Ed. Seuil – 2002
David Lurie est enseignant au Cap, en Afrique du Sud, passionné des œuvres de Byron et de Wordsworth. A 52 ans, deux fois divorcé, la question de sa vie sexuelle est facilement résolue : il paye une femme légère et chaque jeudi de la semaine est "une oasis de luxe et de volupté". Sur le chemin des écoliers, il croise l'une de ses étudiantes, Mélanie Isaacs. Il la séduit, mais cette relation a tôt fait de faire scandale. Le professeur est démissionné pour "harcèlement sexuel". Pour éviter le regard critique de la ville, il se réfugie chez sa fille, Lucy, propriétaire d'une petite exploitation agricole en province. Là, il assiste aux tâches quotidiennes de la campagne, des ventes de fruits et légumes à la protection des animaux, à la violence aussi, qui monte depuis la ville, partagée entre le vol et le viol…
Nous avons là un livre complexe et dérangeant, partagé entre le plaisir de vivre libre et le poids de l’avis des autres. L'Afrique du Sud est alors un pays en pleine mutation. Le livre est fort ! MM
Anti-héros sur fond d’Afrique du Sud. Un bon livre, mais j’ai eu du mal à accepter le fatalisme de sa fille violée. - FL


*La ferme africaine, de Karen Blixen
Ed. Folio – 2006
Une autobiographie romancée. L'auteure nous conte ses années passées au Kenya, alors colonie anglaise. Elle est à la tête d'une exploitation agricole de très grande taille où plantations de café voisinent avec prairies et terres laissées au libre usage des indigènes Kikuyus. Les Masaïs, guerriers dépossédés de ce qui faisait leur orgueil, les armes, vivent dorénavant du pastoralisme dans une réserve située à proximité. Tel est le cadre de ce beau récit, véritable cri d'amour pour une Afrique depuis longtemps disparue, où coutumes et langues se côtoient sans se mélanger.
Une belle histoire, plus vraie et plus puissante que celle du néanmoins très beau film « Out of Africa ». MM
Aucune réserve sur ce vraiment très beau livre ! - FL

*L’Africain, de J. M. G. Le Clézio
Ed. Folio – 2005
Un voyage bref mais touchant dans le passé de l'écrivain, qui essaie, à travers les souvenirs de sa jeunesse en Afrique, de dresser le portrait d'un père qu'il a mal connu et qui pourtant lui a communiqué sa vision d'un monde sauvage, insaisissable... Avec sa mère et son frère, il est arrivé au Nigéria à l'âge de huit ans, et c'est à ce moment qu'il a connu son père, médecin de brousse, autoritaire, froid, dur. C'est aussi l'âge de mille découvertes, physiques et sensorielles, le premier contact avec la mort, avec la vieillesse, avec la peur.
Un livre touchant, une écriture simple et belle - AML

*Léon l’Africain, de Amin Maalouf
Ed. Le livre de Poche –1987
Cette autobiographie imaginaire part d'une histoire vraie. En 1518, un ambassadeur maghrébin, de retour d'un pèlerinage à La Mecque, est capturé par des pirates siciliens et offert en cadeau à Léon X. Ce voyageur s'appelait Hassan al-Wazzan. Il devint le géographe Jean-Léon de Médicis, dit Léon l'Africain. Sa vie, que ponctuent les grands événements de son temps, est fascinante : il se trouvait à Grenade pendant la Reconquista, d'où il a dû fuir l'Inquisition, en Egypte lors de sa conquête par les Ottomans, en Afrique noire à l'apogée de l'empire de l'Askia Mohamed Touré, enfin à Rome aux plus belles heures de la Renaissance, ainsi qu'au moment du sac de la ville par les soldats de Charles Quint. Homme d'Orient et d'Occident, homme d'Afrique et d'Europe, on pouvait difficilement trouver personnage dont la vie corresponde davantage à l'époque étonnante que fut le XVIe siècle.
Une fresque historique romancée, très riche et très intéressante - NM

* L’immeuble Yacoubian, de Alaa El Aswany
Ed. Acte Sud –2007
Construit en plein cœur du Caire dans les années 1930, vestige d'une splendeur révolue, l'immeuble Yacoubian constitue un creuset socioculturel très représentatif de l'Egypte du XXIe siècle naissant. Dans son escalier se croisent ou s'ignorent Taha, le fils du concierge, qui rêve de devenir policier ; Hatem, le journaliste homosexuel ; le vieil aristocrate Zaki, perdu dans ses souvenirs… Témoin d'une époque, l'auteur pose, sans juger, un regard tendre sur des personnages riches et pauvres, bons et méchants, qui se débattent dans le même piège, celui d'une société dominée par la corruption politique, la montée de l'islamisme, les inégalités sociales, l'absence de liberté sexuelle, et la nostalgie du passé.
L'auteur nous ouvre les yeux et l'on comprend aisément comment les laissés pour compte deviennent le ferment idéal d'un intégrisme rampant. J'ai beaucoup aimé ce livre - NM

*La mort du roi Tsongor, de Laurent Gaudé
Ed. Le Livre de Poche – 2006
Dans une Antiquité imaginaire, le vieux Tsongor, roi de Massaba, souverain d'un empire immense, s'apprête à marier sa fille. Mais au jour des fiançailles, un deuxième prétendant surgit. Pour ne pas avoir à reprendre sa parole à l'un des deux prétendants de sa fille, le roi Tsongor se tue, espérant ainsi éviter la guerre qui se profile, mais c'est peine perdue. La guerre éclate : c'est Troie assiégée, c'est Thèbes livrée à la haine. Le roi ne reposera en paix que lorsque son plus jeune fils lui aura construit sept tombeaux et choisi celui dans lequel il demeurera éternellement. Le jeune Souba part alors pour des années d'errances pendant que la cité devient la proie de la fureur guerrière des combattants dont aucun ne semble prendre l'avantage...  
On a là une tragédie en prose. Il n'est question que d'honneur, de promesse, de sacrifice, de guerres... On est totalement pris.  J'ai adoré ! Un très beau style - VB

*Demain une oasis, de Ayerdahl
Ed. Au diable Vauvert – 2006
Le monde industriel a sacrifié l'hémisphère sud au profit d'ambitieux programmes spatiaux, tandis qu'en Afrique une organisation humanitaire enrôle de force médecins et scientifiques pour lutter contre maladies, malnutrition et misère. Le narrateur, un médecin de formation et technocrate sans conviction, est enlevé et va découvrir peu à peu le sens de l'engagement. Il ne tarde pas à faire cause commune avec ses ravisseurs et devient leur agent dans les instances genevoises de l'Organisation Mondiale de l'Expansion Spatiale. Il détourne des informations et du matériel, oriente des crédits, fait du lobbying. Il se retrouve alors bientôt sur le grill, et échappe de justesse à l'élimination physique. De retour en Af-East, il fait désormais du sérail et d'intéressantes choses lui sont alors montrées. On découvre que l'Afrique va très mal, mais moins mal qu'elle ne le laisse croire...
Un récit de Science Fiction, entre politique et espionnage, et qui se lit d'une traite. Pour moi qui ne suis pas fan du genre, ce fut un plaisir, mais un plaisir éphemère, qui m'a donné l'envie d'aller voir plus loin - GA

*Les titres précédés d'une astérisque sont disponibles à la bibliothèque. 
Notre prochain Cercle de Lecture se réunira vendredi 22 mars, sur le thème :
"Du livre au film".



vendredi 15 février 2013

Les bébés lecteurs sur la trace de la chenille

Plus de vingt paires d'yeux ce matin autour du tapis, le silence était religieux.
Notre poupée Lilas a entonné la chanson d'accueil et une clochette a donné le signal pour dévoiler le tapis de lecture :  "La chenille qui fait des trous"  

Un tapis de lecture inspiré de l'album de Eric Carle
Une minuscule chenille sort de son oeuf et elle a très, très faim. Le lundi elle croque une pomme et fait un trou, le mardi elle croque deux poires et fait deux trous... Bref, elle croque tout sur son passage, et devenue grosse et grasse, elle se blottit dans un coquon bien douillet.
Deux semaines plus tard, elle se transforme en un magnifique papillon !


Les enfants sont un peu jeunes pour compter sur leurs doigts, mais des petites mains s'y essaient : 1 comme une pomme, 2 comme deux poires, 3 comme trois prunes, 4 comme quatre fraises, 5 comme cinq oranges...

  A présent, une petite comptine sur les cinq doigts de la main :

Voici ma main
Elle a cinq doigts.
En voici deux,
En voilà trois.
Voici ma main
Elle a cinq doigts.
En voici quatre,
Et un tout droit 

Une chanson sera reprise par les mamans et les assistantes maternelles :


Enfin, et pour terminer, le petit quart d'heure de lecture avec un adulte. Le moment est attendu, car les enfants aiment transporter et manipuler les livres apportés par la bibliothécaire...

Et ce sont deux toutes petites filles d'à peine deux ans qui ont spontanément rassemblé, rapporté et rangé pas moins de 25 livres dans les deux petites caisses de la bibliothèque. 
  La prochaine séance des Bébés Lecteurs se tiendra le :
jeudi 30 mai 2013

jeudi 7 février 2013

Deux contes amoureux et un Papa très occupé

Ce mercredi nous a réservé une nouvelle surprise : Noémie, 9 ans, s'est offerte de lire un conte aux enfants de l'Heure du Conte, et c'est un conte "pour adulte de moins de 3 ans" que nous lui avons proposé ... 
Mais commençons par nos deux contes amoureux. Le premier conte était un kamishibaï :
Le tigre amoureux, de Muriel Carminati et Barbara Martinez

Ed. Callicephale 
Le tigre du cirque Caracol est amoureux de sa dompteuse Clara. L'animal est jaloux et ses concurrents - l'équilibriste, le jongleur, l'hercule, le dresseur d'éléphants et Monsieur Loyal - il en fait son affaire !
Quand le gentil clown William fait son entrée dans la troupe, il remarque bien l'intérêt que lui porte Clara. Le mauvais sort veut que William tombe accidentellement dans la cage du tigre. Les spectateurs retiennent leur souffle...


Le deuxième conte, un conte Wolof, issu de la tradition orale mauritanienne, a été conté :
La fourmi et le roi Salomon
Dans sa tournée du désert, le roi Salomon constate l'absence d'une fourmi.
Il la retrouve enfin, à l'écart de ses congénères, tout occupée à essayer de déplacer une énorme dune de sable : c'est que sa bien aimée est isolée de l'autre côté de la dune. Ému par tant d'amour, le roi décide de lui venir en aide. Ce qui est une montagne pour une fourmi,  n'est pour lui qu'une bute...

Le dernier conte nous a été lu par Noémie, et à en juger par les rires des enfants, il a fait mouche ! 
Conte N° 2, de Ionesco, ill. Etienne Delessert
Ed.Gallimard Jeunesse - 2009
Quand le téléphone s'appelle fromage, que les pieds sont des oreilles, qu'on ne doit pas dire 'images', mais 'images', il vaut mieux ne plus prendre les mots trop au sérieux...
C'est un jeu des plus familiers : un père raconte des histoires à sa petite fille. Le père est Eugène Ionesco, sa fille a l'esprit de répartie, et Etienne Delessert met le conte en images.
Voici la lecture qu'en fait Eugène Ionesco lui-même ici